Mots clés |
Virus, Immunité innée, TBEV, JAK-STAT, TYK2, Virus émergents, Stratégie d'évasion, BANAL-236, Chauves-souris, ACE2, TMPRSS2 |
Resumé |
Les virus zoonotiques sont des virus qui sont transmis aux humains par une autre espèce animale. Ils sont responsables de nombreuses maladies chez l'homme, comme la grippe, la COVID-19... La réponse immunitaire innée, en particulier les voies de signalisation activées par les interférons (IFN) sont essentielles pour contrer les infections virales. En effet, lors d'une infection virale, les cellules déclenchent une cascade de signalisation menant à la production d'IFN, ce qui permet d'alerter les cellules environnantes et d'activer un état antiviral. Cependant, les virus utilisent diverses stratégies pour contourner cette réponse. Au cours de ce travail, je me suis intéressée à plusieurs virus zoonotiques et à la réponse IFN induite par leur réplication. Le premier axe de cette thèse porte sur les mécanismes d'évasion de la réponse IFN par le virus de l'encéphalite à tiques (TBEV) et le virus de l'encéphalomyélite ovine (LIV), qui appartiennent au genre Orthoflavivirus. Nous avons découvert que la protéine virale non structurale 5 (NS5) de ces 2 virus contrecarre la voie JAK/STAT, qui est centrale à la réponse IFN. Des analyses de spectrométrie de masse ont identifié une interaction entre les protéines NS5 et la tyrosine kinase 2 (TYK2), une kinase essentielle de la voie JAK/STAT. Nous avons identifié 10 acides aminés du domaine polymérase de la NS5 qui étaient nécessaires à l'interaction avec TYK2. Des essais in vitro avec des protéines purifiées ont montré que la NS5 de TBEV et LIV réduit la capacité de TYK2 à phosphoryler la protéine STAT1, bloquant ainsi l'induction de l'expression de gènes ayant des propriétés antivirales. Cette interaction NS5-TYK2 est conservée chez différentes espèces de mammifères et est spécifique des Orthoflavivirus transmis par les tiques. Le second axe de recherche de ma thèse porte sur les betacoronavirus de chauve-souris et notamment sur les virus BANAL-236 et BANAL-52, qui sont très proches du SARS-CoV-2. Ils ont été isolés chez des chauves-souris du genre Rhinolophus en Asie du Sud-Est. Nous avons étudié la réplication de ces virus dans des cellules de R. ferrumequinum immortalisées (RFe). Nous avons montré qu'elles n'étaient pas susceptibles à l'infection et nous avons donc généré des lignées surexprimant ACE2 et TMPRSS2, qui sont des facteurs d'entrées des betacoronavirus. Des tests d'entrée utilisant des pseudovirus exprimant les protéines de spicule (S) de SARS-CoV-2, BANAL-236 et BANAL-52 ont montré que l'expression conjointe de hACE2 et hTMPRSS2 à la surface des cellules humaines et RFe est nécessaire pour permettre l'entrée virale. La cinétique de réplication a été analysée par des approches de RT-qPCR et cytométrie de flux. Des expériences de titrations ont montré que des virions infectieux étaient produits par les cellules RFe exprimant hACE2 et hTMPRSS2 infectées par BANAL-236 ou SARS-CoV-2, démontrant que le cycle viral complet a bien lieu. Une analyse des sites de réplication a également été effectuée par microscopie électronique. Malgré une réplication efficace de BANAL-236, aucune induction de gènes stimulés par l'IFN n'a été détectée dans les cellules humaines ou RFe, suggérant que le virus a développé des mécanismes efficaces pour échapper à la réponse IFN. Des études sont en cours pour identifier quelles sont les protéines virales qui participent à ces mécanismes d'évasion. En conclusion, cette thèse a permis de mettre en lumière de nouveaux mécanismes d'échappement viral à la réponse immunitaire innée, tant pour les Orthoflavivirus transmis par les tiques que pour les betacoronavirus de chauve-souris. Elle souligne également l'importance de développer des modèles cellulaires pertinents pour étudier les interactions entre les virus et leurs espèces réservoirs, ouvrant ainsi de nouvelles perspectives pour la compréhension des zoonoses virales. |