Resumé |
Les interféronopathies de type I (IP1s) sont des maladies mendéliennes individualisées en 2011 et caractérisées par une activation constitutive de la voie des interférons (IFNs) de type I. La majorité des génotypes décrits jusqu'à présent impliquent des protéines de l'immunité innée appartenant aux voies de signalisation cytosoliques (telles que celles de RIG-I, MDA5 ou cGAS-STING). En particulier, aucune mutation de la voie des Toll-like récepteurs (TLRs) endosomaux, des récepteurs de l'immunité innée qui entrainent la production d'IFN de type I et de cytokines pro-inflammatoires après détection de leurs agonistes, n'avait été décrite comme causant une IP1 jusqu'en 2022. Au cours de ce travail, je décris deux IP1 liées à des mutations de protéines de la voie des TLRs, à savoir TLR7 et UNC93B1. En parallèle, j'ai aussi amélioré la description clinique et moléculaire du syndrome COPA, une IP1 caractérisée par une activation de la voie de STING. Les mutations gain de fonction (GOF) de TLR7 ont été décrites pour la première fois en 2022 chez des patients avec des phénotypes variables de lupus érythémateux systémique (LES) ou de neuromyélite optique. Au cours de ma thèse, j'ai décrit deux nouvelles mutations de TLR7 et j'ai démontré in vitro leur pathogénicité. Ce travail a permis de révéler une atteinte neurologique atypique rappelant celle des IP1. Enfin, en prenant en compte les autres mutations préalablement décrites, ce travail a mis en évidence le rôle probable de l'interface de dimérisation de TLR7 dans la physiopathologie. La principale partie de cette thèse s'est intéressée aux mutations GOF de UNC93B1, une protéine chaperonne des TLRs reconnaissant les acides nucléiques. Nous avons identifié chez 5 familles composées de patients présentant des LES ou lupus-engelures (LE), une forme cutanée limitée de lupus, des variants d'intérêt dans UNC93B1. De manière intéressante, nous avons montré in vitro que les variants retrouvés chez les patients avec LES causaient un gain d'activité de TLR7, et de TLR8 dans une moindre mesure, alors que les variants des patients avec LE présentaient un gain d'activité de TLR8 seul. Nous avons pu confirmer dans les cellules de patients le gain spécifique de TLR7 et de TLR8, ou de TLR8 seul, dans deux familles différentes. Par ailleurs, bien que le mécanisme exact du gain d'activité observé ne soit pas encore élucidé, nous avons pu montrer qu'il était indépendant de la syntenin-1, une protéine impliquée dans le trafic de TLR7, et qu'il y avait un gain d'affinité entre TLR8 et certains variants de UNC93B1. Ce travail permet donc de décrire une nouvelle cause d'IP1 et met en évidence un rôle propre de TLR8 dans l'auto-inflammation. Pour finir, la troisième partie de cette thèse a été consacrée au syndrome COPA. J'ai rassemblé, à notre connaissance, la plus importante cohorte de patients avec syndrome COPA. L'analyse des données cliniques a révélé de nombreuses manifestations d'organes dont certaines étaient encore peu décrites telles que l'atteinte cutanée, digestive, hépatique et cardiaque. De plus, l'analyse des données génétiques montre la possibilité de mutations de novo ou somatiques. Enfin, ce travail confirme l'effet prometteur des inhibiteurs de JAK dans cette pathologie sévère. En conclusion, ma thèse élargit le champ de recherche des IP1 liées à la voie des TLRs, des maladies de description très récente. La découverte de ces nouvelles maladies mendéliennes permet non seulement d'apporter une réponse à des familles en errance diagnostique mais suggère l'utilisation dans le futur de thérapeutiques ciblées, telles que les inhibiteurs de TLR7/8. La mise en évidence d'un rôle propre de TLR7 et de TLR8 dans l'auto-inflammation et l'auto-immunité est sans aucun doute la partie la plus intéressante de mon travail de thèse, car ce constat est aussi possiblement pertinent pour des maladies polyfactorielles telles que le LES non monogénique. |