Resumé |
La mort subite de l'adulte reste une cause majeure de décès. Considérant les résultats modestes sur le versant thérapeutique, avec une survie qui reste inférieure à 10%, l'optimisation de nos stratégies préventives actuelles apparait essentielle pour continuer à améliorer le pronostic des patients. L'objectif de ce travail était d'identifier les lacunes des stratégies actuelles de prévention de la mort subite, à travers les données du registre francilien du Centre d'Expertise Mort Subite (CEMS). Ce registre collecte prospectivement depuis 2011 tous les cas d'arrêts cardiaques extrahospitaliers à Paris et en petite couronne. La collaboration étagée entre le SAMU et les pompiers de Paris, les différents services hospitaliers (réanimation, cardiologie, etc...), et l'Institut Médico-Légal de Paris, assure une exhaustivité unique. Sur le versant de la prévention primaire, nos données démontrent que la maladie coronaire est la première cause de mort subite chez les jeunes adultes avant 40 ans. Pourtant, ces patients étaient moins souvent adressés pour une coronarographie immédiate à l'admission à l'hôpital. Le faible taux de coronarographies immédiates réalisées chez ces patients suggère que la maladie coronaire est sous-estimée chez les jeunes adultes, y compris par la communauté médicale, et témoigne de lacunes dans la prise en charge précoce de ces patients. Par ailleurs, ces données soulignent que les actions de santé publique visant à contrôler les facteurs de risque cardiovasculaire chez les jeunes adultes pourraient avoir un impact significatif sur la mortalité liée à la mort subite. Sur la population spécifique des patients porteurs d'une cardiopathie congénitale, nos résultats démontrent que la mort subite reste un évènement rare à l'échelle de la communauté, et que si le taux de survie est supérieur par rapport aux patients non congénitaux, il est comparable après appariement, suggérant que cette différence semble en lien avec un âge plus jeune et d'autres facteurs de bons pronostics plus fréquents. Par ailleurs la majorité des cas survenait chez des patients avec une cardiopathie congénitale simple ou modérée, soulignant l'importance de l'amélioration de la stratification du risque rythmique et d'un suivi médical rigoureux auprès de cardiologues spécialisés en cardiologie congénitale pour prévenir au mieux le risque de mort subite, y compris dans les phénotypes les moins complexes. En prévention secondaire, nos données ont révélé que les explorations étiologiques après un arrêt cardiaque inexpliqué étaient nettement insuffisantes en pratique courante. Ainsi, le diagnostic de fibrillation ventriculaire idiopathique semble porté par excès. L'identification de la cause de l'arrêt cardiaque est pourtant essentielle pour optimiser la prévention secondaire afin d'initier un traitement spécifique quand il existe, transmettre au patient les règles hygiéno-diététiques appropriées, mais aussi pour optimiser le dépistage des apparentés. Ces données soulignent l'importance de mettre en place des investigations systématiques, standardisées, et exhaustives. Enfin, le diagnostic de vasospasme coronaire, qui représentait 2% des causes cardiaques d'arrêt cardiaque soudain, était probablement sous-estimé par le manque de test de provocation systématique chez les survivants d'un arrêt cardiaque inexpliqué. L'intérêt du défibrillateur systématique chez ces patients doit être mieux défini, notamment en regard des taux de récidives importants de troubles du rythme ventriculaire rapportés dans la littérature, car seulement 25% des patients avec un diagnostic de vasospasme coronaire sortaient de l'hôpital avec un défibrillateur dans notre étude. Ce travail apporte des données importantes sur l'épidémiologie de la mort subite dans des sous-groupes de patients peu étudiés, et identifie différentes directions de recherche visant à optimiser la prévention de la mort subite dans ces populations. |