Mots clés |
Plasmodium ovale, Plasmodium ovale curtisi, Plasmodium ovale wallikeri, Résistance médicamenteuse, Dhfr, Paludisme, Séquençage |
Resumé |
Plasmodium ovale curtisi et P. ovale wallikeri (anciennement P. ovale) sont deux espèces de Plasmodium infectant l'homme, majoritairement retrouvées en Afrique sub-Saharienne et capables de provoquer des accès de reviviscence. Dans une méta-analyse récente, la prévalence de P. ovale spp. a été estimée à environ 1% de l'ensemble des infections plasmodiales, valeur probablement très largement sous-estimée en raison des difficultés à diagnostiquer ces infections. Les caractéristiques cliniques et biologiques des infections associées à ces deux espèces sont à présents largement décrites, mais les travaux de recherche sur P. ovale spp. restent peu nombreux. L'absence d'outils permettant l'étude de ces parasites à l'échelle génétique et génomique constitue en effet un frein majeur à une meilleure compréhension de la biologie et de l'épidémiologie de ces deux espèces. Dans ce travail de thèse, nous avons tout d'abord développé différentes méthodes permettant l'obtention de données de génétique et de génomique de P. ovale spp. : (i) un protocole de selective-Whole Genome Amplification dédié pour chaque espèce, ainsi qu'un protocole de déleucocytation adapté de celui développé par le Sanger Institute pour P. falciparum ; (ii) des protocoles pour le séquençage des gènes pocdhfr et powdhfr ; (iii) des protocoles pour le génotypage de marqueurs microsatellites situés autour du gène powdhfr ainsi que sur l'ensemble du génome de P. ovale wallikeri. Les données préliminaires obtenues à partir des premiers séquençages complets ont révélé l'existence de mutations dans le gène dhfr de P. ovale curtisi et P. ovale wallikeri. Le séquençage du gène dhfr de plus de 500 isolats a confirmé ces mutations, présentes chez 47% des isolats de P. ovale curtisi (dont 40% de mutants A15S+S58R) et 19% des isolats de P. ovale wallikeri (dont 17% de mutants F57L+S58R). L'étude haplotypique réalisée à partir de l'analyse des données de séquençage complet et des marqueurs microsatellites a montré l'existence d'un balayage sélectif autour des deux mutants principaux, sous l'influence probable de l'utilisation à large échelle en zone d'endémie de la sulfadoxine-pyriméthamine. Enfin, l'utilisation d'un modèle bactérien exprimant les enzymes plasmodiales mutantes PocDHFR A15S+S58R ou PowDHFR F57L+S58R démontra l'impact de ces mutations sur la sensibilité à la pyriméthamine. Le second volet de ce travail s'est intéressé aux reviviscences. À partir des données épidémiologiques collectées par le Centre National de Référence du paludisme, nous avons identifié, sur une période allant de 2013 à 2021, 15 patients ayant présenté un accès de reviviscence à P. ovale wallikeri. L'analyse de huit microsatellites répartis dans l'ensemble du génome et du séquençage complet des génomes de quatre paires d'isolats a mis en évidence une très grande proximité génétique entre l'isolat de l'accès initial et l'isolat de l'accès de reviviscence pour 12 des 15 patients étudiés. Ce résultat, attendu dans notre contexte particulier de paludisme d'importation avec des patients vivant hors zone d'endémie palustre - limitant de ce fait le risque d'infection multiple ou d'infection antérieure - constitue, selon nous, la première preuve génétique de l'existence de reviviscence chez P. ovale spp. Ce travail de thèse aura donc permis d'étudier et d'appliquer à l'étude de différents aspects de P. ovale spp. les méthodes que nous avons développées. Malgré des données encore limitées sur la génétique des populations acquises grâce aux données de séquençage complet et à l'étude des microsatellites, il reste encore beaucoup à faire pour mieux comprendre la divergence entre P. ovale curtisi et P. ovale wallikeri et la structure de ces deux populations parasitaires en Afrique sub-Saharienne. De plus, il semble essentiel de mieux caractériser la résistance de P. ovale spp. aux antipaludiques, en poursuivant ce travail par l'étude des autres gènes connus comme associés à la résistance médicamenteuse. |