Resumé |
Cette thèse est un projet CIFRE mené en collaboration avec le CERENE, afin de développer et d'évaluer des outils de diagnostic et de remédiation de la dyslexie, élaborés sur la base de la solide littérature sur le modèle de double voie de la lecture et l'existence de différents sous-types de dyslexie. Le CERENE accueille une majorité d'élèves à l'entrée en 6ème. Pour fournir aux écoles un outil efficace pour caractériser les difficultés de lecture de leurs élèves, nous présentons dans un premier temps un test de décision lexicale. Normé sur 1501 élèves de 6ème, ce test a permis d'étudier du point de vue théorique l'impact du niveau de fluence de lecture sur les résultats de la décision lexicale chez des élèves d'un même niveau scolaire. Les 120 stimuli vus par chaque élève variaient en termes de lexicalité, de longueur (de 4 à 8 lettres) et de fréquence (4 bandes de fréquence, de très fréquent à très rare). Les pseudo-mots comprenaient des pièges orthographiques, des transpositions et des substitutions miroir entre les lettres bd et pq. Nous avons constaté que l'effet de la longueur des mots variait considérablement avec la fluence, les élèves les plus en difficulté montrant un fort effet de longueur même pour les mots fréquents. L'effet de la fréquence variait aussi avec la fluence, mais uniquement en proportion de la vitesse de lecture globale, suggérant que la fréquence affecte la phase de décision chez tous les lecteurs, tandis que la longueur impacte davantage les mauvais lecteurs. Les performances sont également influencées par le type de pseudo-mot, et ces effets varient peu avec le niveau de fluence. Puisqu'il est aussi important de pouvoir détecter des déficits de lecture spécifique chez les jeunes enfants, nous avons ensuite conçu la Mariette, un test qui tient compte des erreurs exactes faites par l'enfant contrairement à d'autres comme l'Alouette, pourtant largement utilisé par chercheurs et praticiens pour quantifier la fluidité de la lecture. C'est un texte non signifiant contenant des mots réguliers, des mots irréguliers, des pseudo-mots et des mots pouvant entraîner des erreurs de transposition ou de migration inter-mots. Les erreurs de 797 élèves du CP au CM2 ont été caractérisées afin d'établir des seuils d'erreurs au-delà desquels un enfant est susceptible de présenter un déficit spécifique. Enfin, le CERENE constate que de plus en plus de parents s'interrogent sur les outils d'aide à la lecture pour enfants dyslexiques fondés sur la stroboscopie comme la lampe Lexilight® ou les lunettes Lexilens®. Puisque quelques cas isolés de dyslexiques aidés par le clignotement à basse fréquence ont été décrits dans la littérature, nous avons d'abord mené deux études impliquant une tâche de décision lexicale informatisée avec un affichage constant ou un clignotement à basse fréquence (10 ou 15 Hz). Chez 375 adultes normaux-lecteurs, le clignotement a ralenti la reconnaissance des mots et biaisé légèrement la décision en faveur des pseudo-mots, tandis qu'aucun effet n'a été observé chez 20 élèves dyslexiques. Compte tenu du manque de données sur les dispositifs stroboscopiques, nous avons ensuite évalué l'impact de la lampe Lexilight® et des lunettes Lexilens®, qui fonctionnent à des fréquences plus élevées, sur la fluidité de la lecture et l'identification de lettres chez 22 élèves dyslexiques. Aucun impact détectable n'a été observé. Enfin, chez deux participantes qui disaient bénéficier des lunettes Lexilens®, nous avons orthogonalement manipulé le fait que les lunettes soient effectivement allumées et le fait que la patiente croit qu'elles le soient. Seul un petit effet placebo a été observé chez l'une des participantes. Ces résultats contrastent fortement avec les affirmations marketing selon lesquelles ces outils peuvent aider 90% des dyslexiques. Ces résultats ayant été établis en vue d'applications pratiques, les conclusions majeures feront également l'objet de courtes publications en français. |