Mots clés |
Hépatites auto-immunes, MTORC1, RRAGC, PRKAG1, LAMTOR1, LAMTOR3, MTOR, PIK3R1, TSC2 |
Resumé |
Les hépatites auto-immunes (HAI) sont caractérisées par une infiltration lymphoplasmocytaire, la présence d'auto-anticorps et une hypergammaglobulinémie. Malgré un traitement de référence efficace à plus de 80%, la greffe hépatique est nécessaire dans 10% des cas. S'il est admis qu'un facteur externe déclenche une rupture de tolérance sur un terrain génétique prédisposant, aucun gène ni voie de signalisation cellulaire n'ont été mis en cause dans la pathogénie des HAI. mTOR (cible de la rapamycine chez les mammifères), sérine/thréonine kinase ubiquitaire, régule la croissance, la prolifération et la survie cellulaire en réponse à des signaux internes et externes (apport d'acides aminés, stimulation du TCR via la voie PI3K-AKT...). mTOR agit au sein de complexes : mTORC1 et mTORC2. L'activité de mTORC1 dépend de sa translocation lysosomale par les dimères RagA/B-RagC/D et Ragulator (LAMTOR1 à 5), et de sa liaison à Rheb retenue par le complexe TSC (TSC1 et 2). AMPK, composé des 3 sous-unités α, β et γ (codée par PRKAG1), inhibe mTORC1 en cas de déplétion énergétique. L'activation de mTORC1 a des effets pro-inflammatoires dans le bras adaptatif et anti-inflammatoires dans le bras inné du système immunitaire. Entre 2000 et 2021, des échantillons de patients avec HAI ont été adressés au laboratoire pour un séquençage complet de l'exome. Les variants ont été analysés selon leurs scores de CADD, SIFT, PolyPhen-2, leur fréquence, et vérifiés par méthode Sanger. Les lymphocytes T régulateurs ont été analysés par cytométrie de flux. mTORC1 a été étudié par la phosphorylation de S6K1 (substrat de mTORC1) par Western-Blot et de S6 (substrat de S6K1) par cytométrie de flux dans les cellules sanguines circulantes, les cellules T après 6 jours de culture et les cellules B immortalisées des patients. Vingt-deux patients avec HAI ont été inclus, avec un âge médian au diagnostic de 9 ans (1-26) et une durée médiane de suivi de 7 ans (1-27). Chez 8 patients (36%), 9 rares substitutions hétérozygotes prédites comme délétères ont été retrouvées dans 7 gènes codant pour des partenaires directs de mTORC1 : RRAGC, PRKAG1, LAMTOR1, LAMTOR3, MTOR, PIK3R1 et TSC2. Les patients avec variants (M+) présentaient plus de défaillance hépatique et de cirrhose que les autres patients (M-). La médiane d'intensité de fluorescence (MFI) des marqueurs de lymphocytes T régulateurs (FoxP3, Helios et CTLA-4) était diminuée chez les patients M+ versus les contrôles. La proportion de cellules CD3+P-S6+ et de cellules CD19+P-S6+ et la MFI de P-S6 étaient augmentées chez les patients M+ versus M- et versus les contrôles. Dans les cellules T, la proportion de cellules P-S6+ et la MFI de P-S6 étaient augmentées chez les patients M+ versus M- après stimuli immunitaire et versus les contrôles après sevrage en acides aminés. Dans les cellules B immortalisées après sevrage ou stimuli immunitaire, la proportion de cellules P-S6+, la MFI de P-S6 et l'expression deP-S6K1 étaient plus élevées chez le patient avec variant RRAGC versus le contrôle. Par rapport au sevrage en acides aminés, la proportion de cellules P-S6+ et la MFI de P-S6 étaient diminuées après traitement par des inhibiteurs de mTOR des cellules T des patients M+ et des cellules B immortalisées avec le variant RRAGC. Le séquençage complet de l'exome chez des patients avec HAI a permis d'identifier 9 variants-candidats dans 7 gènes directement impliqués dans la voie mTORC1, ayant un rôle majeur dans la régulation du système immunitaire. L'activation de mTORC1 est anormalement élevée dans les lymphocytes avec variants en condition basale, après sevrage en acides aminés et après stimuli immunitaire. La voie mTORC1 apparait comme une cible thérapeutique potentielle en cas d'hyperactivation dans les lymphocytes circulants de patients atteints de maladies auto-immunes. |