Mots clés |
Moelle osseuse, Niche hématopoïétique, Cellules souches hématopoïétiques, Cellules souches mésenchymateuses, Cancer du sein, Cellules myéloïdes, Différenciation |
Resumé |
L'hématopoïèse est le processus biologique qui permet à l'organisme de générer les cellules érythroïdes, lymphoïdes et myéloïdes qui circulent dans le sang et qui composent notre système immunitaire. L'hématopoïèse s'effectue à partir de cellules souches hématopoïétiques (CSH) qui résident dans la moelle osseuse, au sein d'un microenvironnement notamment composé de cellules stromales appelé la niche hématopoïétique. Les différentes cellules qui composent la niche hématopoïétique envoient des signaux aux CSH, contrôlant leur capacité d'auto-renouvellement, leur prolifération et leur différenciation en cellules hématopoïétiques matures. Au sein de la niche hématopoïétique, les cellules souches mésenchymateuses (CSM) ont un rôle majeur dans la régulation des CSH, en produisant des facteurs de croissance et des chimiokines nécessaires à la survie, la quiescence, la prolifération et la différenciation des CSH et de leur descendance. Chez les patientes atteintes d'un cancer du sein, la majorité des cellules hématopoïétiques infiltrant les lésions tumorales se compose de cellules myéloïdes, qui incluent les cellules dérivées de monocytes - les macrophages - ainsi que les neutrophiles. Les monocytes, les macrophages et les neutrophiles possèdent des propriétés pro-tumorales favorisant le développement du cancer. Ils peuvent par exemple inhiber les fonctions effectrices des lymphocytes T cytotoxiques, les empêchant ainsi de détruire les cellules tumorales. Nous savons que différents cancers, dont le cancer du sein, peuvent sécréter dans la circulation des molécules régulant la différentiation myéloïde des CSH et la survie des cellules myéloïdes matures. Nous avons ici voulu comprendre si le cancer du sein (et l'inflammation systémique qu'il engendre) pouvait influencer à distance la génération des cellules myéloïdes à partir des CSH de la moelle osseuse et savoir si les cellules stromales de la niche hématopoïétique jouent un rôle dans cette différenciation. Pour cela, nous avons utilisé différents modèles murins de cancer du sein et étudié les changements affectant la moelle osseuse. En utilisant la cytométrie en flux, des données de séquençage de cellule unique (scRNAseq) et la microscopie confocale, nous avons montré que l'abondance des cellules myéloïdes circulant dans le sang et infiltrant la tumeur était associée à une activité hématopoïétique et osseuse modifiées. D'une part, les CSH ont une propension accrue à la différenciation en cellules myéloïdes telles que les monocytes et les neutrophiles. Fonctionnellement, les CSH sont toujours capables de se différencier dans chacun des sous-types hématopoïétiques, mais leur potentiel à générer des cellules myéloïdes est plus important, une caractéristique qui persiste durant plusieurs mois, indépendamment d'un contexte tumoral. D'autre part, les cellules stromales de la niche hématopoïétique sont modifiées en présence d'un cancer, particulièrement les CSM. L'analyse de leur transcriptome suggère une plus forte différenciation vers les ostéoblastes ainsi qu'une activité régulatrice des CSH altérée. La coculture de CSH avec des CSM promeut leur différenciation en cellules myéloïdes, démontrant que les CSM jouent un rôle dans la reprogrammation hématopoïétique observée. Des recherches supplémentaires seront nécessaires pour déterminer précisément les mécanismes tumoraux régulant la différentiation des CSH en cellules myéloïdes, ainsi que le contrôle exercé par les CSM. Notre étude a révélé que des protéines impliquées dans la formation osseuse circulent plus abondamment dans le sérum des souris ayant un cancer du sein. Ces molécules sont des candidats intéressants pouvant expliquer l'altération de la moelle osseuse qui a lieu, comme nous l'avons démontré, lors du développement tumoral mammaire. |