Resumé |
Les anticorps produits lors d'une infection virale ont de nombreuses fonctions. Ils se fixent aux virions et empêchent l'infection des cellules cibles, un processus nommé neutralisation. Ils peuvent également se lier aux particules virales ou aux cellules infectées et recruter d'autres effecteurs immunitaires, comme le complément ou les cellules Natural Killer (NK). Certains patients infectés par le VIH-1 développent des anticorps efficaces contre la majorité des souches virales circulantes. Ces anticorps sont dénommés anticorps neutralisants à large spectre, ou bNAbs (broadly neutralizing antibodies). La plupart des stratégies vaccinales visent à induire la production de ces bNAbs. Ils sont également des candidats de choix pour des approches thérapeutiques innovantes. Leur large spectre de neutralisation ainsi que leur capacité à induire la lyse des cellules infectées après activation des cellules NK ont été largement caractérisés. Dans ce travail de thèse, nous caractérisons deux activités antivirales des bNabs. Dans une première étude, nous montrons que les bNAbs sont capables d'activer le complément à la surface de lymphocytes T CD4 infectés par le VIH-1. Cette activation est sous-optimale et ne permet pas la lyse des cellules infectées. La mort cellulaire dépendante du complément est inhibée par la protéine régulatrice CD59 et par les protéines virales accessoires Vpu et Nef qui réduisent l'activation du complément en limitant la fixation des anticorps aux cellules infectées. Malgré cette absence de lyse rapide des cellules infectées, l'activation du complément semble diminuer leur survie à long terme. Dans une seconde étude, nous démontrons que les bNAbs empêchent la libération des particules virales depuis des cellules infectées par le VIH-1. Les bNAbs forment à la surface des cellules infectées de larges complexes immuns de virions. Cette activité requiert la bivalence des bNAbs et n'est observée qu'avec les anticorps les plus puissants. Nous nous sommes également intéressés à la réponse humorale déclenchée lors d'une infection par le SARS-CoV-2. Bien qu'il ait été montré que les anticorps produits lors de l'infection ont une activité neutralisante, leurs fonctions contre les cellules infectées n'étaient pas décrites. Nous montrons que les anticorps de patients infectés par le SARS-CoV-2 déclenchent une activation sous-optimale du complément à la surface des cellules infectées n'aboutissant pas à la mort cellulaire. En revanche, les anticorps anti-SARS-CoV-2 peuvent induire la mort des cellules infectées en recrutant les cellules NK. Enfin, nous comparons la fonctionnalité des anticorps générés lors d'une infection symptomatique ou asymptomatique par le SARS-CoV-2, ce dernier cas concernant environ 50% des individus infectés. Dans les deux cas, la réponse humorale générée est polyfonctionnelle et capable à la fois de neutraliser le virus et de cibler les cellules infectées en activant le complément ou les cellules NK. Les patients symptomatiques ont des niveaux d'anticorps légèrement plus élevés, et en conséquence une réponse humorale légèrement plus fonctionnelle.Ces résultats démontrent que les activités des anticorps anti-VIH-1 et anti-SARS-CoV-2 ne se limitent pas à la neutralisation. Plusieurs fonctions, chacune agissant de manière différente sur les cellules infectées et les particules virales, participent à l'activité antivirale des anticorps. Comprendre leurs interactions permettra de déterminer les modes d'actions des anticorps thérapeutiques et vaccinaux et d'en optimiser leur utilisation. |