| Mots clés |
Leptospira, Neutrophiles, Myocardite, Lésions vasculaires, Leptospirose, Immunité innée, Réaction Jarisch-Herxheimer, Antibiotiques, Récepteurs Toll-like, IL-10, Tempête de cytokines |
| Resumé |
La leptospirose est une zoonose ré-émergente, négligée, de répartition mondiale qui affecte tous les mammifères. L'homme est sensible à la maladie et peut développer des symptômes graves tels qu'une défaillance de plusieurs organes et une hyper-inflammation, entraînant la mort dans 10 % des cas. Les souris et les rats sont plus résistants à la maladie aiguë, et peuvent héberger de manière asymptomatique des leptospires dans les reins, jouant ainsi le rôle de réservoirs. Le diagnostic de la leptospirose est difficile à établir en raison du grand nombre de sérovars et de la variété des symptômes cliniques. Sa physiopathologie est mal comprise. Dans la première partie de cette thèse, nous avons caractérisé un modèle de leptospirose létale aiguë chez la souris, en la comparant à une infection asymptomatique. De manière inattendue, nous avons montré que la maladie létale était associée à des signes de myocardite et à des signes légers de pancréatite. Étonnement, nous n'avons pas observé de signes d'hyper-inflammation associés à une « tempête de cytokines », ni de dysfonctionnement typique des poumons, des reins et du foie. En revanche, nous avons constaté que les neutrophiles jouaient un rôle préjudiciable pour l'hôte en favorisant la perméabilité vasculaire. Une caractéristique commune de la leptospirose chez l'homme et la souris est le recrutement de neutrophiles dans la circulation. La deuxième partie de cette thèse s'est donc concentrée sur l'étude des neutrophiles dans la leptospirose. Malgré leur activation normale par les leptospires, les neutrophiles sont incapables d'éradiquer les bactéries, ce qui confirme les données publiées précédemment. Cependant, nos données préliminaires suggèrent qu'ils pourraient stimuler de manière indirecte les macrophages en augmentant leur capacité bactéricide, mais le mécanisme est encore à l'étude. De manière inattendue, nous avons démontré que dans le modèle de leptospirose aiguë mortelle, les neutrophiles sont les principaux producteurs d'IL-10, une cytokine anti-inflammatoire qui aide les leptospires à échapper à la défense innée. Dans la troisième et dernière partie de cette thèse, nous avons cherché à décrypter le rôle inflammatoire des antibiotiques administrés au cours de la leptospirose aiguë (effet Jarisch-Herxheimer). Nous avons supposé que l'administration d'antibiotiques, le plus souvent des β-lactamines en France, dégraderait la paroi cellulaire des leptospires, les rendant ainsi reconnaissables par le système immunitaire inné. En effet, notre laboratoire a précédemment montré in vitro que les leptospires sont des agents pathogènes furtifs qui échappent à de nombreux récepteurs de l'immunité innée bien qu'elles soient de puissants agonistes de TLR2 en raison de leurs lipoprotéines abondantes. En utilisant le modèle murin de leptospirose létale et du sang humain de volontaires sains infecté par les leptospires, nous avons montré que l'administration d'antibiotiques augmentait les niveaux de cytokines et de chimiokines pro-inflammatoires dans le sang. En outre, nous avons démontré que cette inflammation provenait de la fraction enrichie en neutrophiles et que ce phénotype était dépendant de la reconnaissance par TLR2 chez la souris. En conclusion, nos travaux remettent en question l'opinion courante selon laquelle la leptospirose est une maladie semblable au sepsis accompagnée d'une tempête de cytokines alors qu'il s'agit d'une infection furtive conduisant à une myocardite et à des lésions vasculaires, les leptospires détournant les réponses des neutrophiles à leur avantage. De futures études translationnelles sont nécessaires pour confirmer ces résultats chez les patients atteints de leptospirose. Nos travaux pourraient également inciter les médecins à administrer d'autres classes d'antibiotiques qui n'altèrent pas la paroi cellulaire des leptospires, ce qui pourrait éviter une réponse inflammatoire délétère pour le patient. |