Santé au travail, Travailleurs hospitalier de nuit, Professionnels de santé, Substances psychoactives, Santé mentale, Covid-19

À l'hôpital, la prise en charge des patients est continue de jour comme de nuit. Les équipes intervenant la nuit pour assurer la continuité des soins sont particulièrement exposées à un risque de dégradation de leur santé. En effet le travail de nuit, peut altérer les rythmes circadiens, les rythmes hormonaux et les rythmes sociaux. Concrètement les conséquences du décalage de ces rythmes peuvent entrainer à la fois des troubles du sommeil, des problèmes de santé mentale, des risques d'usage de substances psychoactives (SPA) et des difficultés sociales. Si la santé des travailleurs hospitaliers de jour a été particulièrement investiguée pendant la pandémie, ce n'est pas le cas de celle des travailleurs hospitaliers de nuit (THN) n'ayant jamais fait l'objet de recherches spécifiques. Ce travail de thèse s'est développé autour de plusieurs objectifs. D'abord, permettre une description, une évaluation et une compréhension des consommations de SPA en lien avec l'environnement de travail des THN. Puis fournir une évaluation des troubles de la santé mentale, du sommeil et des facteurs qui les affectent pendant la première vague de la pandémie. Enfin, cette thèse a investigué les préférences et attentes d'interventions concrètes des THN pour l'amélioration de leur qualité de vie au travail. Ce travail s'appuie sur deux enquêtes (quantitative et qualitative) qui ont permis l'obtention de données qualitatives et quantitatives entre décembre 2019 et septembre 2020. Elles portaient sur la santé, les comportements et le vécu de l'impact de la pandémie des THN. Pour le volet qualitatif, une approche inductive générale et une analyse thématique ont été mobilisées pour analyser et interpréter les données issues d'entretiens semi-directifs. Les analyses ont porté sur les relations implicites et explicites entre l'environnement de travail et les consommations de SPA. Concernant le volet quantitatif de l'étude, une enquête en ligne a été diffusé à l'ensemble des THN de l'Assistance Publique des Hôpitaux de Paris. Les données ont été analysées pour estimer la prévalence des consommations des différentes SPA mais aussi des troubles de la santé mentale. Des modèles de régression ont été utilisés pour étudier la relation entre les changements organisationnels du travail, la perception du travail de nuit sur la santé mentale des THN. Une analyse lexicométrique et une analyse thématique ont été mobilisées pour le traitement des réponses textuelles du questionnaire. Ce travail a permis de mettre en évidence que plus de 60% des THN déclarent subir des bouleversements dans l'organisation de leur travail pendant la pandémie de Covid-19 ainsi que des représentations négatives sur leur travail. Ce sont les spécificités du travail de nuit et les difficultés sociales associées, qui influent sur la santé mentale et sur les consommations de SPA. En effet, les THN présentent des niveaux élevés d'anxiété, de dépression, d'insomnies et de stress post traumatique qui semblent faciliter le recours à l'usage de SPA. Les SPA sont consommées non seulement comme moyen de gestion du stress et pour améliorer la qualité du sommeil mais aussi pour affronter l'isolement au travail qui a un impact important sur la dimension psychosociale de la vie des THN. Leur santé mentale est significativement liée aux changements organisationnels de leurs vies professionnelles liés au Covid-19 ainsi qu'aux représentations négatives du travail de nuit des autres professionnels hospitaliers et de leur entourage. Pour améliorer la qualité de vie au travail, il existe des propositions et perspectives d'interventions qui peuvent être classées en 3 niveaux distincts : au niveau individuel, au niveau du système de santé et au niveau institutionnel. Ces résultats soulignent l'importance de la mise en place d'interventions complexes multiniveaux pour améliorer la qualité de vie au travail et la santé des THN.