Mots clés |
Hyperplasie Macronodulaire Bilatérale des Surrénales, HMBS, Cushing, Cortisol, Syndrome de Cushing dépendant de l'alimentation, Peptide insulinotrope glucose-Dépendant, GIP, GIPR, Génétique, Génomique, ARMC5, KDM1A |
Resumé |
Contexte : L'Hyperplasie Macronodulaire Bilatérale des Surrénales (HMBS) est une maladie rare caractérisée par des macronodules surrénaliens bilatéraux, potentiellement responsables d'un hypercortisolisme (syndrome de Cushing). Une première cause génétique a été identifiée en 2013 : des mutations constitutionnelles inactivatrices hétérozygotes du gène suppresseur de tumeur ARMC5, responsable de 20 à 25% des cas. L'atteinte surrénalienne bilatérale et la description de cas familiaux sans mutation d'ARMC5 suggèrent l'existence d'autres facteurs de prédisposition génétique. L'HMBS est une pathologie hétérogène sur les plans clinique, biologique et radiologique et dont la présentation varie des incidentalomes surrénaliens bilatéraux sans hypercortisolisme clinique à un élargissement massif des surrénales associé à une syndrome de Cushing sévère. Objectifs : Comprendre l'hétérogénéité clinique de l'HMBS, identifier de nouveaux gènes de prédisposition, mieux caractériser les patients sur les plans clinique, biologique et radiologique. Méthodes : Les données cliniques de 352 patients index européens ont été collectées rétrospectivement pour la corrélation génotype/phénotype, l'ensemble des variations d'ARMC5 a été recensé, incluant celles décrites dans la littérature et celles identifiées dans notre centre. Une analyse multi-omique, associant RNAseq, méthylome, miRNome, exome et SNP array, a été réalisée sur les échantillons surrénaliens de 36 patients opérés pour une HMBS. Résultats : L'analyse de la série de 352 patients génotypés pour ARMC5 confirme que les patients mutés ont un phénotype plus marqué que les patients non mutés, en termes de sévérité du syndrome de Cushing et de l'atteinte surrénalienne. 100% des patients mutés ont une atteinte surrénalienne bilatérale claire en imagerie et au moins un hypercortisolisme modéré, défini par un cortisol après freinage par la dexaméthasone supérieur à 50 nmol/L, alors que ces critères sont inconstants chez les patients non mutés. L'association de ces 2 critères a une sensibilité de 100% pour la détection d'une mutation d'ARMC5. Nous proposons que le génotypage d'ARMC5 soit réservé aux patients présentant ces deux critères simples afin d'augmenter le rendement du séquençage, avec un taux de mutation de 20%. Nous présentons 133 mutations constitutionnelles différentes d'ARMC5, dont 50 jamais décrites dans la littérature, représentées majoritairement par des variants non-sens, faux-sens, et des insertions/délétions avec décalage du cadre de lecture. L'évaluation de la pathogénicité des variants faux-sens est parfois difficile, et se base sur leur fréquence en population, leur ségrégation dans les cas familiaux, les prédictions in silico, et les études fonctionnelles disponibles. Nos données fonctionnelles permettent une meilleure classification de nombreux variants faux-sens. L'analyse intégrée des données de génomique des échantillons de 36 patients HMBS révèle trois groupes moléculaires distincts : G1, comprenant les tumeurs des 16 patients porteurs d'une mutation d'ARMC5 ; G2, les tumeurs des 6 patients présentant un syndrome de Cushing dépendant de l'alimentation, médié par l'expression illégitime du récepteur du GIP par les cellules corticosurrénaliennes ; et G3, les tumeurs des autres patients avec phénotype plus hétérogène. L'analyse de l'exome identifie des mutations constitutionnelles inactivatrices hétérozygotes du gène KDM1A chez 5/6 patients du G2, constamment associées à une perte d'hétérozygotie dans la surrénale du bras 1p portant le locus KDM1A, aboutissant à une inactivation biallélique du gène. Conclusion : Ces travaux permettent une meilleure caractérisation des patients porteurs d'HMBS, l'identification de critères prédictifs d'une mutation d'ARMC5, une meilleure compréhension de l'hétérogénéité clinique de l'HMBS et la découverte de la cause génétique de l'HMBS associée à un syndrome de Cushing dépendant de l'alimentation : le gène suppresseur de tumeur KDM1A. |