Resumé |
Les pandémies qui ont impacté le début du XXIe siècle (la grippe H1N1 en 2009 et la COVID-19 actuellement) soulignent l'importance du défi global que posent les maladies infectieuses virales émergentes et ré-émergentes à nos sociétés. Par exemple, au cours des deux dernières années seulement, le virus chikungunya (CHIKV) a provoqué des épidémies majeures dans plusieurs pays d'Asie du Sud-Est, auxquelles s'ajoute le fardeau croissant du syndrome respiratoire aigu sévère (SARS-CoV-2), avec des conséquences majeures dans le monde entier. Bien que les pandémies ne soient pas un phénomène nouveau, la popularité croissante des technologies de séquençage de nouvelle génération, l'accélération de la génération de données génomiques - qui élargissent les bases de données de génomes viraux - et les progrès des méthodes phylodynamiques ainsi que de l'informatique ont permis d'utiliser les génomes viraux pour répondre à des questions épidémiologiques cruciales, renforçant les réponses de la santé publique aux épidémies. Ce travail s'est concentré sur l'étude de l'origine, aussi bien spatiale que temporelle, et de la propagation des maladies infectieuses virales d'épidémies passées et en cours. Pour ce faire, nous avons utilisé l'épidémiologie génomique et montré qu'elle peut être un outil très puissant pour enquêter sur les épidémies de maladies infectieuses à différents niveaux. Par exemple, nous avons réussi à mettre en place un protocole de séquençage métagénomique profond qui nous a permis de découvrir que le probable agent étiologique responsable d'une série de cas de méningite dans le sud de l'Espagne, au cours de la période 2015-2018, était le virus Toscana (TOSV), un arbovirus responsable d'un nombre croissant d'infections dans les pays bordant la mer Méditerranée. Ensuite, nous avons développé une approche de séquençage basée sur des amplicons qui nous a permis d'obtenir la séquence complète du TOSV à partir d'échantillons de qualité et charge virale très variables. Nous sommes ensuite allés plus loin dans les analyses des épidémies de CHIKV au Cambodge. En effet, l'analyse phylogénétique des génomes que nous avons générés nous a permis d'étudier la diversité génétique du CHIKV et, en ajoutant des données temporelles, d'estimer le moment auquel il a été introduit dans la population. Dans un second temps, une analyse phylogéographique nous a fourni un niveau de détail supplémentaire en mettant en lumière les origines de l'épidémie, les liens avec les épidémies précédentes dans la même région et la dispersion du virus dans le pays. Enfin, à une autre échelle, nous avons pu suivre la dynamique de la population virale du SARS-CoV-2 lors de l'infection à long terme d'un patient immunodéprimé, ce qui a souligné les défis de la prise en charge de ces membres vulnérables de notre société pour lesquels il existe un risque accru de maladie grave. Pour conclure, ces travaux contribuent à une meilleure compréhension de l'épidémiologie et l'évolution de plusieurs virus à ARN qui représentent encore aujourd'hui des menaces importantes pour la santé humaine, et soulignent les apports de l'épidémiologie génomique contre les épidémies. |