Mots clés |
Claudine, Jonction serrée, Émail, Amélogenèse imparfaite, Améloblaste, FHHNC, PH |
Resumé |
Les protéines claudines sont des composants des jonctions serrées conférant à ces dernières des fonctions de pores ioniques sélectifs ou de barrière. La claudine (CLDN) 16 s'associe à la CLDN19 pour former des pores sélectifs aux cations (Ca²¿ et Mg²¿), toutes deux exprimées au niveau du rein dans la branche large ascendante de l'anse de Henlé (BLAH), et au cours de la formation de l'émail dentaire, au pôle apical des améloblastes sécréteurs. Des mutations dans les gènes CLDN16 et CLDN19 sont à l'origine d'une pathologie rénale, l'hypomagnésémie familiale avec hypercalciurie et néphrocalcinose (FHHNC), récemment associées à une amélogenèse imparfaite. Dans des souris invalidées pour le gène Cldn16 (Cldn16-/-), la déficience en claudine 16 conduit à une altération des jonctions serrées des améloblastes sécréteurs, et à une baisse significative du pH de l'émail en formation, engendrant des anomalies de l'émail similaires à celles observées chez les patients atteints de FHHNC. Afin de vérifier si la formation de l'émail est affectée localement par la déficience en claudine 16, des germes dentaires de souris Cldn16-/- ont été cultivés en milieu semi-solide pour s'extraire de l'effet systémique rénal. Les analyses micro-CT ont montré une diminution de la densité de l'émail des germes issus de souris Cldn16-/- comparées aux souris Cldn16+/+ et mettent donc en évidence l'effet local de la déficience de la claudine 16 sur la minéralisation. En parallèle, pour mieux comprendre le rôle des claudines au cours de l'amélogenèse, nous nous sommes intéressés à une seconde protéine de la famille, la claudine 3, connue pour son rôle d'étanchéité des jonctions serrées et dont l'expression dans les épithéliums est ubiquitaire. Chez les souris Cldn3-/-, nous avons également mis en évidence des défauts de minéralisation de l'émail. Les conséquences de la déficience de claudines sur la structure des jonctions serrées ont ensuite été étudiées par microscopie électronique en transmission (MET) et par tomographie en microscopie électronique (TEM-TOMO) chez les souris Cldn3-/- et Cldn16-/-, respectivement, pour caractériser les jonctions intercellulaires au niveau du pole apical d'améloblastes sécréteurs. De façon similaire aux souris Cldn16-/-, les souris Cldn3-/- présentaient des jonctions altérées, irrégulières et denses. Ce résultat a été confirmé par la mesure du volume de l'espace intercellulaire au niveau du pôle apical des améloblastes sécréteurs significativement plus élevé chez les souris Cldn16-/- par rapport aux souris Cldn16+/+. La déficience en claudines altère donc le phénotype des jonctions intercellulaires apicales des améloblastes sécréteurs. Pour déterminer si la baisse du pH au niveau de l'émail en formation chez la souris Cldn16-/- était liée à cette altération de structure des jonctions intercellulaires, nous avons utilisé comme modèle expérimental la BLAH pour étudier la perméabilité paracellulaire aux H¿, et nous avons montré que cette dernière n'était pas affectée par la déficience en claudine 16. L'analyse du transport transcellulaire des protons dans les améloblastes sécréteurs par des expériences de western blot et d'inhibition enzymatique a, par contre, permis de mettre en évidence une augmentation de l'expression et de l'activité de l'anhydrase carbonique II et la V-ATPase, deux enzymes impliquées dans l'homéostasie du pH. En conclusion, nos travaux ont montré que la déficience en claudines (3 et 16) au cours de l'amélogenèse conduisait à des altérations des jonctions intercellulaires des améloblastes sécréteurs générant des défauts de minéralisation de l'émail. L'acidification de la matrice amélaire en cours de formation observée parallèlement serait associée à une perturbation du transport transcellulaire de protons. L'ensemble de ces résultats suggère ainsi un rôle essentiel des jonctions serrées au cours de la formation de l'émail. |