Resumé |
La drépanocytose est la maladie génétique la plus fréquente au monde. Une mutation non sens ponctuelle du gène codant la chaîne beta de l'hémoglobine induit une déformation « en faucille » (falciformation) et une fragilité des érythrocytes dans des conditions hypoxiques. L'obstruction de la microcirculation par les érythrocytes falciformés, ou crise vaso-occlusive (CVO), est cause d'ischémie sévère, souvent douloureuse et menaçant la structure et la fonction des organes. Malgré la simplicité de l'origine moléculaire de la drépanocytose, un état inflammatoire complexe généralisé est associé à cette maladie, impliquant d'autres types cellulaires. En particulier, les granulocytes neutrophiles, des cellules immunitaires phagocytaires professionnelles responsables de la première vague inflammatoire en situation d'infection ou de lésion tissulaire, joueraient des rôles physiopathologiques ont été associés à la maladie. Les neutrophiles sont plus nombreux, plus activés, et leur nombre et niveau d'activation sont épidémiologiquement corrélés à la sévérité des complications aigües de la maladie. Ils participent activement au processus de vaso-occlusion à cause de leur adhérence et potentiel inflammatoire exacerbés. TREM-1 (Triggering Receptor Expressed on Myeloid cells-1) est un récepteur principalement exprimé à la surface des cellules immunitaires myéloïdes neutrophiles, monocytes et macrophages. Son activation lui confère un rôle d'amplificateur de l'inflammation infectieuse comme stérile. Dans cette étude, nous avons cherché à élucider son implication physiopathologique dans plusieurs modèles murins de drépanocytose grâce à une inhibition pharmacologique d'une part, et à une approche par délétion génétique d'autre part. L'inhibition pharmacologique de TREM-1 grâce au peptide LR12 a permis une forte réduction de l'adhérence et de la transmigration pathologiques des neutrophiles en réponse à une stimulation par le TNF alpha dans les veinules post-capillaires crémastériques de souris exprimant à l'état homozygote (SS) les gènes humains de l'hémoglobine S (alpha2 beta2S) selon la technique « knock-in ». La dynamique du comportement des neutrophiles a été étudiée par microscopie intravitale de fluorescence ultra rapide. Suivant une épreuve d'hypoxie-réoxygénation induisant un CVO expérimentale, l'inhibition pharmacologique de TREM-1 a permis une réduction significative de l'engorgement vasculaire en globules rouges dans le foie, la rate, les poumons et la médullaire rénale, du rapport poids de la rate / poids du corps ainsi qu'une réduction de l'infiltrat tissulaire en neutrophiles dans le foie, les poumons et la rate des souris SS. Nous n'avons pas réussi à associer ces effets physiopathologiques majeurs à une inhibition du niveau d'activation des neutrophiles, malgré la différence caractérisée entre les souris AA et SS à l'état de base. Nous avons montré que les souris drépanocytaires SS possédaient des concertations plasmatiques de sTREM-1 plus élevées que leur témoins sains AA. L'inhibition pharmacologique du récepteur n'a pas permis une baisse de ces niveaux lors de l'épreuve d'hypoxie-réoxygénation. La délétion du gène Trem-1 chez les souris drépanocytaires SAD a permis une réduction significative de l'adhérence et de la transmigration pathologiques des neutrophiles dans les veinules post-capillaires crémastériques de souris SAD, observées par microscopie intravitale, suite à une stimulation inflammatoire par le TNFalpha. Pris ensemble, ces résultats indiquent un rôle important du récepteur TREM-1 dans la physiopathologie de la drépanocytose, ainsi qu'un potentiel prometteur du LR12 pour le traitement clinique des crises vaso-occlusives drépanocytaires. |