Mots clés |
Carcinomes bronchiques non à petites cellules, Nf1, Voie RAS-MAPK, Next generation sequencing, CRISPR/Cas9, Thérapies ciblées, Modèles murins |
Resumé |
La neurofibromine, produit du gène NF1, agit comme un inhibiteur de la voie RAS-MAPK (Mitogen-activated protein kinases), voie majeure de la cancérogenèse. Le gène NF1 est donc un gène suppresseur de tumeurs. Des mutations constitutionnelles hétérozygotes perte-de-fonction de NF1 causent la neurofibromatose de type 1 (NF1 ; MIM#162200). Cette maladie rare prédispose notamment au développement de tumeurs des gaines nerveuses. Des mutations somatiques de NF1 ont par ailleurs été décrites dans des cancers sporadiques, hors contexte de neurofibromatose. Des données récentes de la littérature confirment que NF1 est un gène suppresseur de tumeurs crucial en oncologie. L'implication de la voie RAS-MAPK dans les cancers bronchiques non à petites cellules (CBNPC) est bien caractérisée avec la mise en évidence de mutations somatiques activatrices spécifiques de la voie, notamment des oncogènes EGFR, KRAS et BRAF dans les adénocarcinomes pulmonaires. Cependant, l'implication du gène NF1 a été peu étudiée dans les CBNPC. Nous avons confirmé l'implication de NF1 dans le développement des adénocarcinomes bronchiques par une approche ciblée de NGS (Next Generation Sequencing) sur une cohorte de 138 échantillons tumoraux : 36 altérations somatiques (26%) de NF1 ont été retrouvées dont 25 mutations ponctuelles (parmi lesquelles 4 homozygotes) et 11 délétions. Ces altérations étaient majoritairement exclusives de mutations affectant d'autres effecteurs de la voie RAS-MAPK. Il était retrouvé un nombre plus important d'altérations de NF1 dans les échantillons de patients ayant reçu une chimiothérapie. Une corrélation génotype-phénotype a pu être établie : il s'agissait en majorité d'hommes (72%), fumeurs (75%) avec une survie sans progression et une survie globale significativement meilleures que les patients KRAS mutés. Afin de déterminer les conséquences fonctionnelles des altérations de NF1, nous avons établi des modèles cellulaires mutés dans NF1 grâce au système d'édition du génome CRISPR/Cas9. Trois lignées de carcinomes bronchiques non à petites cellules ont été modifiées génétiquement. Nous avons notamment évalué les conséquences de l'inactivation bi- ou mono-allélique de NF1 réalisée respectivement par CRISPR/Cas9 et Nickase. Les western blot ont confirmé la perte d'expression partielle ou complète de la neurofibromine en cas de mutations mono- ou bi-alléliques du gène NF1 ainsi qu'une activation de la voie RAS-MAPK avec un ratio pERK/ERK augmenté en cas de mutations. Nous avons observé que les clones NF1-/- présentaient un phénotype plus agressif en termes de migration, invasion et prolifération que les clones NF1+/- ou sauvages. L'analyse différentielle des transcriptomes a montré des profils transcriptomiques distincts en cas d'altérations homozygotes ou hétérozygotes de NF1 ainsi que dans les cellules sauvages ; les profils transcriptomiques des clones sauvages étaient plus proches des clones avec mutations hétérozygotes de NF1. Des approches pharmacologiques in vitro sur nos modèles cellulaires transgéniques pour tester la sensibilité aux inhibiteurs de MEK seuls ou en association avec des inhibiteurs de PIK3CA, ainsi que la validation in vivo sur des modèles de xénogreffes murines sont en cours. Notre étude montre que les CBNPC présentant des altérations somatiques de NF1 constituent une entité clinique et pronostique distincte. L'étude de nos modèles cellulaires permettra (1) d'évaluer l'influence du caractère mono- ou bi-allélique des altérations de NF1 sur les conséquences fonctionnelles et (2) de tester de nouvelles perspectives thérapeutiques qu'il conviendra de confirmer in vivo sur des modèles pré-cliniques. |